Bernhart Ketterer avait entre 6 et 8 ans quand il vivait en Alsace. Après la guerre, il a tenté de questionner ces parents sur ce sujet, mais ils refusaient d’en parler. Bernhart Ketterer a toutefois appris que treize familles de la Dreisamtal, , près de Fribourg-en-Brisgau, avaient été des Siedler. Toutes avaient un point commun : le père était un vétéran de 14-18, blessé lors de la Première Guerre mondiale. « Je suppose que mon père et d’autres vétérans ont refusé de faire la guerre une seconde fois et qu’ils ont trouvé cette solution pour y échapper », avance l’octogénaire.
Théo Hirth, enseignant retraité qui vit à Ruederbach dans le Sundgau, avait en 2013 écrit une pièce de théâtre sur ce sujet, inspirée de la vie de ses parents qui avaient fui en Suisse et dont la ferme avait été occupée par un Siedler : « Dans le cas de mes parents, le Siedler, meunier de métier, avait vu son moulin fermé par les autorités. Les nazis lui avaient alors laissé le choix entre exploiter une ferme en Alsace ou en Ukraine. Il a pris la ferme de mes parents à Ruederbach. En décembre 1944, quand mon père, engagé dans l’armée de libération, est revenu à Ruederbach, le Siedler était toujours là, hébergé par des voisins. Il est resté à Ruederbach jusqu’au 15 janvier 1945, date à laquelle la Résistance l’a arrêté et interné dans un camp à Poitiers. Son parcours et, surtout, le fait qu’il ne soit pas retourné en Allemagne en novembre 1944, me font penser qu’il s’agissait peut-être d’un opposant au régime nazi », explique Théo Hirth.