Chose a priori étonnante, l’Alsace peut compter sur un noyau fidèle de supporters bâlois. Ils sont moins turbulents que les ultras du foot et réussissent à s’exprimer via le web. Un exploit quand on sait que la plupart d’entre eux mettent le papier en avant.

Par Jean-François OTT – Aujourd'hui à 06:21 – Temps de lecture : 3 min

De gauche à droite : Hugo Neuhaus-Gétaz, Robert Heuss et Hans-Jörg Renck.  Photo DNA /Jean-François OTT

Entre Bâle et l’Alsace ne coule pas la Manche. De même que Bâle n’est pas la perfide Albion… Au contraire : les Bâlois sont empreints d’empathie pour les Alsaciens : ils nous accordent des salaires mirobolants, nous offrent (en partie) des rails de trams, sauvent nos maisons alsaciennes pour les refonder à Allschwil quand ils ne soutiennent pas les programmes immobiliers locaux en y achetant des duplex avec vue sur le Rhin, dépensent leurs sous dans nos restaurants et se gavent de notre folklore ainsi que de la richesse culturelle qu’offre notre région. Enfin les historiens vous rappelleront que l’évêché de Bâle régnait, pour ainsi dire en maître, sur une partie du Sud Alsace et qu’à la suite du dépeuplement de l’Alsace au XVI Ie siècle, de nombreux Suisses, alors gangrenés par la pauvreté, y ont trouvé une nouvelle prospérité (ils doivent se mordre les doigts, aujourd’hui). Il y avait également autrefois un bus qui partait de la gare de Bâle et faisait découvrir à ses passagers éberlués les merveilles de l’Alsace, racontent certains d’entre eux avec encore des étoiles dans les yeux.

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Un capital sympathie

Mieux : à Bâle depuis 1985, il se trouve une association qui promeut l’Alsace et son dialecte. L’association culturelle des Amis de l’Alsace à Bâle. Nous n’en demandions pas tant ! C’est l’ouverture de l’Écomusée d'Alsace qui a précipité cette construction, puisque cette initiative a suscité de nombreuses adhésions au-delà de la frontière franco-suisse. Quand on vous disait que les Bâlois aiment notre région !

« C’est vrai que l’Alsace suscite un vrai capital sympathie auprès des Bâlois. Même si les prix français ont augmenté, il y a toujours un attrait pour la culture qui est d’une diversité étonnante, ce qui n’a rien à voir avec la Suisse du Nord-Ouest. Ainsi tous les mois, nous remplissons un bus avec nos membres pour visiter votre région », assure Robert Heuss, président des Amis de l’Alsace depuis 2007. Ancien chef de la chancellerie du canton de Bâle-Ville, il est un allié de poids pour l’Alsace. De même que les 450 membres de l’association (au plus fort du mouvement).

Un intérêt mû par le partage de la même langue

« Les liens qu’entretiennent nos membres avec l’Alsace ne sont pas si profonds que cela. Si nos membres viennent, c’est en premier lieu pour une question de contact social, il s’agit souvent de personnes âgées isolées. Dans ce cas, l’Alsace n’est pas un but mais un moyen, tempère un autre membre, Hugo Neuhaus-Gétaz. Mais nous souhaitons, malgré cela, approfondir nos contacts avec l’Alsace en raison de nos liens historiques et aussi parce que beaucoup de nos membres aiment le dialecte alsacien. Et pour cause : c’est de l’alémanique qui est également parlé chez nous ! »

Derrière l’adhésion culturelle de l’association à cette belle Alsace, apparaît un objectif bien plus approfondi, mû par ses membres les plus actifs : « Nous nous intéressons à la politique dialectale, nous voulons que ce dialecte ne disparaisse pas car notre vision de cette région des Trois frontières, ce Dreiland, c’est qu’elle ait une langue commune, l’alémanique », poursuit Robert Heuss. « C’est notre cheval de bataille » , insiste une autre figure de proue de l’association, Hans-Jörg Renck.

BALE ELSASS GAZETTE

Le papier d’abord

Et pour promouvoir des idées, il faut des supports. En matière de communication, l’association a dû se mettre au web , presque à contrecœur, au début. L’idée s’est imposée en 2007. Un premier site a vu le jour, piloté par Hugo. Il a été dépoussiéré et adapté aux nouvelles contingences liées aux smartphones en 2020. Fait particulier, la gazette trimestrielle éditée par l’association a toujours le dessus sur le web, en termes de contenu et de dynamisme éditorial. « En revanche, on peut lire la gazette en PDF sur notre site, qui est plutôt pensé comme un outil de communication interne », défend son webmaster.

La gazette contient des textes et des poésies en alémanique. Elle serait plus adaptée à l’âge moyen des Amis de l’Alsace. Le site internet en revanche, est plutôt dédié aux jeunes générations. Avec ce challenge de les y faire venir, et peut-être également de donner au web un rôle plus moteur ?

Partie de Bâle, la course pour le dialecte Sprochrenner s’élance via Huningue

Appelée à arriver à Wissembourg lundi, la première « Sprochrenner », course de relais pour la langue et la culture régionales, organisée par l’association éponyme, a pris le départ de Huningue ce samedi 4 juin,après un petit échauffement à Bâle.

Par Nicolas LEHR – 05 juin 2022 à 05:49 | mis à jour le 05 juin 2022 à 17:45 – Temps de lecture : 3 min

Dans ce coin du Rhin supérieur où d’aucuns n’hésitent pas à piquer une tête, il est encore plus facile de plonger dans le bain linguistique. Une évidence selon le maire de Huningue Jean-Marc Deichtmann, qui a rappelé, au départ de la première course de relais pour la langue et la culture régionales « Sprochrenner », la force des liens qui unissent ce secteur si particulier que trois pays s’y rencontrent.

« Nos racines sont communes, même si les arbres sont devenus différents », souligne celui qui préside également Saint-Louis Agglomération , en rappelant que cette collectivité multiplie les initiatives de sorte à laisser toute sa place au dialecte. « Les braises sont encore chaudes, il faut souffler dessus », poursuit-il, conscient cependant qu’il s’agit peut-être d’une des dernières chances de raviver la flamme.

U…

Le sentier des QR codes

Par L'Alsace – Aujourd'hui à 06:21 – Temps de lecture : 2 min

Markus Manfred Jung, poète alémanique lors de l’inauguration d’un panneau sur le sentier des poètes des Trois Pays à Huningue.  Photo L’ALSACE /Thierry GACHON

L’association des Amis de l’Alsace à Bâle se distingue également par une autre mission qui leur a été conférée : celle d’animer et de gérer le site internet consacré au sentier des poètes qui court le long des berges de Huningue, Bâle et Weil am Rhein, du pont des Trois Roses à la passerelle des Trois Pays : http://www.dreylanddichterweg.eu/fr. En partie fermé en raison de travaux importants (N.D.L.R., la dépollution de la STEIH), ce sentier est désormais praticable de A à Z.

27 poèmes à écouter

Cette voie dédiée aux mobilités douces (et qui emprunte un tronçon de trois véloroutes) qui est comme un trait d’union entre les trois pays et les trois villes, avec la fraternité alémanique pour ciment, égrène quelque 24 panneaux de part et d’autre du Rhin. Trois nouveaux s’y sont ajoutés en début d’année. Y sont gravés des poèmes en alémanique, traduits en français et en anglais, qui éclairent les écritures de plusieurs poètes français, suisses ou badois et témoignent de la vitalité de cette langue.

« Ces poèmes, on peut tous les écouter en langue alémanique sur notre site internet, s’enthousiasme Hugo Neuhaus-Gétaz, le webmestre de l’association. Encore mieux : il y a un QR code gravé sur chaque plaque, il y en a donc 27 en tout. Tous renvoient à la fiche de l’auteur concerné sur notre site internet, vous pourrez y lire la biographie du poète et écouter le poème. »

Il semblerait qu’encore récemment, les QR codes ne fonctionnaient pas, mais l’association jure vouloir faire le nécessaire pour les remettre d’aplomb, ce serait d’ailleurs le cas dès à présent. « Ce sentier créé des liens qui perdurent aujourd’hui, c’est pour cela que c’est important pour nous. »

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